La police prédictive débarque en France

Mercredi 15 avril, 16 heures 05. Assis dans la salle de réunion en compagnie d’une quinzaine de ses collègues, l’agent Murder écoute le sergent faire son rapport sur les incidents de la matinée. Et elle est déjà bien remplie : deux agressions avec arme, une tentative de viol, trois cambriolages et cinq vols de voiture. D’un coup de télécommande, le sergent allume un écran d’ordinateur dont l’image est projetée au mur et apparaît alors un plan détaillé de la ville, sur lequel on distingue dix petits carrés rouges : un carrefour, un square, un centre commercial, un terrai de sport… Ce sont les « hot spots », les points chauds à surveiller en priorité. D’après l’ordinateur connecté au système PredPol (contraction de Predictive Policing) les délits ont une forte probabilité de se concentrer, au cours des douze prochaines heures, dans ces carrés de 150 mètres carrés représentant une infime fraction de la superficie de la ville…

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Apocalypse orange.

À l’occasion de la sortie de mon premier roman, je retrouve Eric Michel pour une longue interview que je présente ici en intégralité.

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Eric Michel : Bonjour. On te connaît surtout pour tes travaux scientifiques et tes essais politiques. Pourquoi un roman ?

Nicolas Bourgoin : La fiction a été un prétexte pour développer certaines analyses de façon moins rébarbative que dans un écrit académique. Certains auteurs ont suivi cette voie, je pense notamment à Lucien Cerise avec Oliganarchy. La question de la surveillance des populations, celle du conditionnement médiatique ou encore celle de la guerre anti-subversive qui forment la matière de mon roman sont traitées de manière plus vivante et plus accessible que dans un ouvrage théorique. Et le procédé de l’uchronie permet de décentrer le regard porté sur notre société, de la redécouvrir à partir d’un point de vue différent. Lire la suite

RFID : la police numérique arrive et ses pouvoirs sont illimités.

Vivre avec une puce électronique sous la peau, c’est désormais possible et même recommandé. Les Implant parties fleurissent un peu partout en Europe et l’une est d’ores et déjà prévue à Paris le 13 juin, organisée par le collectif de biohackers suédois Bionyfiken. Au menu : conférences (en anglais) et pose d’implants NFC (garantie indolore). Festives et hi-tech, ces soirées vantent les mérites de cette dernière folie technologique qui ouvre un peu plus la voie au transhumanisme : plus besoin de badge pour s’identifier, de carte bancaire pour payer ou de code pour déverrouiller son smartphone ou son ordinateur. La puce permet aussi le stockage de données personnelles directement lisibles sur un terminal de lecture. Selon ses promoteurs, il s’agit avant tout d’améliorer nos capacités d’êtres humains par la biotechnologie et d’optimiser notre rapport à l’environnement, en bref nous faciliter la vie et nous rendre plus efficaces. Il s’agit aussi de préparer l’opinion publique à ce qui sera demain la norme quand les pouvoirs publics rendront le puçage obligatoire.

Pratiqué aux Etats-Unis depuis une dizaine d’années, le puçage cutané s’étend rapidement en Europe. Certaines entreprises suédoises proposent déjà l’implant de puces à leurs employés afin de les rendre plus productifs et en Espagne elles servent de moyens de paiement dans certaines discothèques. Mais l’affichage promotionnel du procédé cache mal sa finalité réelle. Les volontaires de ce marquage électronique dernier cri sont en réalité les cobayes d’un projet d’envergure qui vise ni plus ni moins qu’à rendre l’individu totalement transparent et à le livrer pieds et poings liés aux dispositifs de surveillance et de contrôle.

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« La République contre les libertés » (entretien avec Eric Michel)

Eric Michel est l’auteur de deux romans « Algérie ! Algérie ! » et « Pacifique » qui ont rencontré un vif succès critique. Humaniste et engagé, sensible à la cause des peuples colonisés ou opprimés par l’impéralisme, Eric Michel est lecteur de mes travaux depuis quelques années. A l’occasion de la sortie de mon dernier livre, « La République contre les libertés », il s’est prêté au jeu d’un entretien amical au sujet de questions qui parcourent ce travail : la conversion libérale de la gauche, l’instrumentalisation de la laïcité, l’obsession antiterroriste, la censure de l’expression publique, entre autres. Cet entretien est présenté ci-après.

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