Échauffourées à Nantes : Valls ressort l’épouvantail de l’ultra-gauche

En chute libre dans les sondages, Manuel Valls tente de redorer son image de ministre de l’Intérieur autoritaire et volontariste. Pour cela rien de mieux que la bonne vieille recette de l’ennemi intérieur : créer un état de panique morale en agitant une menace, puis la conjurer à grands renforts de déclarations musclées tout en renforçant au passage les dispositifs sécuritaires par de nouveaux décrets ou de nouvelles lois. L’islamiste, le Rom, Dieudonné et Soral ont ainsi servi, bien malgré eux, de faire-valoir au Ministre. Les affrontements violents ce samedi entre policiers et manifestants à Nantes contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes lui ont donné une nouvelle cible : l’ultra-gauche. En réalité, pas si nouvelle que ça… Lire la suite

Islamophobie : la LJDM aura-t-elle gain de cause contre Charlie Hebdo ?

Toujours le deux poids/deux mesures. Tandis que le lynchage médiatico-politique redouble d’intensité contre l’humoriste Dieudonné, l’islamophobie est quasiment banalisée en France au nom de la « liberté d’expression ». On peut en juger par cette couverture de Charlie Hebdo du 10 juillet dernier « Le Coran c’est de la merde » n’ayant pas suscité la moindre indignation de la part des associations de l’antiracisme institutionnel. Ce journal, passé du scato-gauchisme au néoconservatisme, s’est d’ailleurs fait une spécialité de ces « unes » islamophobes qui lui avaient valu il y a quelques années un procès intenté par la Grande Mosquée de Paris, l’Union des organisations islamiques de France et la Ligue islamique mondiale pour «injure envers un groupe de personnes en raison de sa religion».– procès ayant évidemment abouti à une relaxe (voir ici). Cette fois-ci, c’est la Ligue Judiciaire des Musulmans, un collectif d’avocats mobilisés contre l’islamophobie, qui a décidé de réagir. La LDJM aura-t-elle (enfin) gain de cause contre la haine religieuse ? On ne peut hélas qu’en douter…

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Le droit local alsacien pourra-t-il faire progresser la lutte contre l’islamophobie ? C’est en effet au nom du délit de blasphème supprimé du Code pénal par un décret du 8 juin 1906 mais subsistant dans le droit dérogatoire d’Alsace Moselle que la Ligue de défense judiciaire des musulmans (LDJM), dirigée par Karim Achoui, assigne Charlie Hebdo pour ce motif devant le tribunal correctionnel de Strasbourg. Cette décision de porter plainte a provoqué, comme l’on pouvait s’y attendre, la colère des associations islamophobes, comme Riposte Laïque (voir ici). La première audience s’est ouverte lundi 17 dernier. Les poursuites visent la une de l’hebdomadaire satirique du 10 juillet dernier, qui, après une tuerie en Egypte, titrait : « Le Coran c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles ». La LDJM poursuit aussi le journal pour « provocation et incitation à la haine à raison de l’appartenance religieuse ainsi que d’injure » devant le tribunal de grande instance à Paris (voir ici le texte complet de la plainte de la LDJM).

Mais la plainte a (évidemment) très peu de chances d’aboutir. Il n’y a pas eu d’application de l’article 166 sanctionnant le délit de blasphème depuis… 1918. Reste le motif d’incitation à la haine raciale ou religieuse qui, elle, relève du droit pénal commun. De ce côté aussi, les chance sont maigres : la justice déboute systématiquement les groupes religieux qui, devant les tribunaux, questionnent la liberté d’expression au nom de la défense de leur religion. Les représentants de l’Union européenne devant l’ONU, confrontée à ces débats depuis une quinzaine d’années, considèrent que les droits de l’homme ne protègent pas et ne doivent pas protéger les systèmes de croyance.

Si le verdict attendu confirmera sans doute la partialité du droit pénal français et confortera tous ceux qui pensent à raison que le justice française est une justice aux ordres, il ne doit pas décourager les musulmans et tous ceux qui combattent courageusement la haine raciale ou religieuse. Cela ne peut que contribuer à faire reculer l’islamophobie qui gangrène notre société et fait plusieurs milliers de victimes par an en France.

Qui est derrière le coup d’État en Ukraine ?

Les impérialistes occidentaux ne renoncent jamais. Après avoir tenté en vain de faire tomber le régime de Bachar al-Assad à grands renforts de campagnes médiatiques mensongères et de livraisons d’armes aux rebelles (voir ici), ils ont réussi à écarter l’Iran de la conférence de Genève 2 destinée à trouver une issue politique à la guerre en Syrie (voir ici). Au Venezuela, la tentative de coup d’État orchestrée par la CIA se poursuit dans un silence diplomatique assourdissant (voir ici). Autre front : l’Ukraine, pivot géostratégique entre l’Ouest et l’Est,  repassée depuis 3 ans dans le giron russe après la période calamiteuse de la gouvernance « orange ». La tactique est la même – aide financière à une opposition factice et diffusion massive de contrevérités médiatiques à propos de la répression menée par le pouvoir -, le but également : affaiblir la Russie en la privant de ses partenaires commerciaux et en l’isolant diplomatiquement. Révolution orange, le retour. Lire la suite

Le pétard mouillé du « Rapport sur l’intégration »

Peut-on rompre en profondeur avec les politiques assimilationnistes qui ont fait le lit des pratiques discriminatoires que nous connaissons en France ? Le Rapport sur l’intégration remis au Premier ministre semble en tout cas ouvrir une brèche en appelant à une refondation des politiques d’intégration en France pour mieux défendre les diversités culturelles et promouvoir un « droit à la différence » et une laïcité « inclusive ». Il s’agit de mettre en place une « gouvernance de l’Etat » pour la lutte contre les discriminations avec la création d’une autorité indépendante de lutte contre les discriminations sociales et ethniques et d’une instance de pilotage des politiques publiques en la matière. Le rapport propose également la création d’un délit de harcèlement ethnique, d’une « Cour des comptes de l’égalité », ainsi que des pistes pour en finir avec les « discriminations légales » notamment en ce qui concerne les questions relatives à la laïcité. Concrètement, le rapport propose de l’assouplir et milite pour l’abrogation de certaines lois anti-voile. Est-il raisonnable d’y croire ? Lire la suite

Caroline Fourest ou l’obsession anti-Islam

On ne présente plus Caroline Fourest, défenseure infatigable de la laïcité, du droit des femmes et des homosexuels. Pendant un temps responsable du Centre gay et lesbien de Paris, fondatrice de la revue féministe ProChoix, ancienne collaboratrice du Monde et de Charlie Hebdo, elle pratique l’omniprésence médiatique, dénonçant inlassablement l’intégrisme dans les conférences et sur les plateaux de télévision où elle est régulièrement invitée. La constance de son  engagement lui a valu en 2005 d’être lauréate avec sa compagne Fiammetta Venner du prix national de la laïcité remis par le Comité Laïcité République, les récompensant « pour leurs actions contre tous les fondamentalismes religieux et leurs avatars liberticides, ainsi que pour leur engagement face à l’extrême-droite».

Mais, comme bien souvent, le noble combat pour la « laïcité » (à géométrie variable) et la « défense du droit des femmes » (surtout voilées) est là pour dissimuler un projet nettement moins glorieux… Lire la suite

Crise : l’UE à l’épreuve de la « stratégie du choc »

La « stratégie du choc » est une politique de démantèlement des biens publics et de réduction drastique des libertés menée après une grave crise économique, politique ou environnementale, un attentat ou une guerre. Elle s’inspire des techniques de lavage de cerveau et de privation sensorielle employées par la CIA visant à détruire la mémoire du sujet, briser ses capacités de résistance et obtenir une « page blanche » sur laquelle écrire une nouvelle personnalité. A l’échelle d’une population, il s’agit de faire « table rase » du passé en réduisant à zéro le patrimoine public d’un pays, ses structures sociales et économiques pour y construire une nouvelle société. Privées de leurs points de repères, littéralement en état de choc, les populations victimes de ce traitement se sont vues spoliées de leurs biens publics (éducation, santé, retraites) et de leurs libertés par l’oligarchie et ses élites sans même pouvoir et vouloir se défendre. Les Chiliens sous la dictature de Pinochet ou les Argentins sous celle de Videla, les Russes victimes de la « thérapie de choc » de Boris Elstine, les Irakiens victimes de la campagne de bombardements intensifs américains de mars 2003 baptisée  Shock and Awe (choc et effroi), le peuple de Louisiane victime du cyclone Katrina, les Américains victimes de  l’escroquerie du 11 septembre et ses dérives liberticides, les Sud-Africains, les Chinois ou les Polonais victimes de la contre-révolution néo-libérale,…  la liste est encore longue de tous ceux qui ont servi de cobayes à cette doctrine insensée née dans le laboratoire de l’Université Mac Gill à Montréal. Elle a étrangement épargné l’Europe de l’Ouest… jusqu’à la crise des subprimes de 2007-2008.

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UE : opération propagande en vue des élections

L’eurosepticisme monte en Europe en dépit de la propagande assénée par les media officiels. Austérité sans fin voulue et décidée en dehors de tout débat démocratique, carcan monétaire de l’euro imposé par l’oligarchie européenne, réduction des libertés publiques, laminage de la démocratie et mise en place prochainement d’un grand marché transatlantique UE-USA qui achèvera de liquider ce qui reste de protection sociale et de droit du travail… L’Europe apparaît de plus en plus clairement pour ce qu’elle est : une machine à broyer les peuples au service exclusif de la finance mondialisée. A l’approche des élections européennes de juin prochain, la crainte des eurocrates de voir encore monter le taux d’abstention grandit. Comment contrer les critiques à l’égard de l’UE qui circulent dans les réseaux sociaux et diffuser la propagande officielle sur les « bienfaits » de l’Europe ? La censure pure et simple n’est pas (encore) à l’ordre du jour. Restent les techniques de communication… et d’infiltration. Lire la suite

La Révolution sécuritaire

Eric Michel : Bonjour, tout d’abord une question naïve : qu’est-ce que la révolution sécuritaire ?

Nicolas Bourgoin : C’est un bouleversement complet dans le traitement pénal de la délinquance et plus largement dans la réaction de l’appareil d’État aux désordres sociaux. En moins de 40 ans, nous sommes passés d’un modèle humaniste fondé sur la prévention sociale et le reclassement des déviants à une fuite en avant dans le tout répressif. Et ce basculement a des conséquences très concrètes : réduction des libertés publiques, multiplication des dispositifs de surveillance, accroissement des violences policières et des gardes à vue, traques aux sans papiers, augmentation spectaculaire du nombre de détenus, fichage généralisé des populations,…

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EM : Le terme de « révolution » semble être ici à contre emploi : révolution est généralement synonyme d’émancipation…

NB : Oui mais il existe aussi des révolutions conservatrices ! Révolution est ici pris dans son sens premier : mouvement circulaire qui fait revenir au point d’origine. La révolution sécuritaire fait du neuf avec du vieux en recyclant les vieilles recettes punitives. C’est un retour aux sources du code de 1810 dans sa version épurée : un moyen pour la bourgeoisie de défendre son pouvoir politique et ses institutions contre les illégalismes populaires et les poussées contestataires. C’est, plus concrètement, le retour à une justice de classe.

EM : En quoi le marxisme t’a servi dans ton analyse ?

NB : Il m’a permis de dépasser les analyses classiques qui se cantonnent souvent au descriptif. Beaucoup d’ouvrages ont été publiés en France sur les politiques sécuritaires, environ une trentaine depuis 2002, mais la grande majorité les considèrent comme un phénomène sui generis ou une mode passagère liée à la couleur politique de la Chancellerie. Or les politiques sécuritaires sont durables et dépendent bien davantage des cycles économiques que des alternances gouvernementales. Elles sont mises en place par la bourgeoisie quand les contradictions du capitalisme, exacerbées par la crise, deviennent ingérables par les méthodes qu’elle employait jusqu’alors, en particulier la régulation par des politiques sociales protectrices et redistributrices. La force brute du pouvoir étatique est alors mobilisée. Cela renvoie à la conception marxiste de l’État comme appareil de contrôle et de répression au service de la classe dominante et bien sûr à l’analyse du fascisme que faisait Georges Dimitrov. La politique sécuritaire est un fascisme moderne.

EM : Pourquoi ces dates : 1976-2012 ?

NB : 1976 est l’année de rédaction du rapport Peyrefitte qui est le premier acte de la révolution sécuritaire. Le pouvoir bourgeois a besoin d’un outil pour casser les résistances populaires à l’austérité instaurée par le gouvernement Barre dans un contexte de crise économique naissante. On a fait bien sûr du répressif avant, en particulier sous le ministère Marcellin, mais pas de manière systématique et globale. Ce rapport a une double fonction : produire un écran de fumée idéologique pour cacher les effets délétères de la crise naissante, justifier les politiques de lutte contre la « violence » (le terme est omniprésent dans le rapport) avec le vote des premières lois sécuritaires : plan Vigipirate (1978), période de sûreté (1978), lois Bonnet (1980) et Sécurité et Liberté (1981). 2012 marque la fin de l’escalade sécuritaire avec le retour de la gauche aux « affaires ». Mais s’il n’y a pas de vote de nouvelles lois, il n’y a pas non plus de retour en arrière. C’est donc davantage un « Thermidor », une pause dans un processus révolutionnaire, qu’une contre-révolution.

EM : Peut-on sortir de la révolution sécuritaire ? et comment ?

NB : Le sécuritaire est le produit de deux facteurs combinés : la crise économique, d’une part, l’incapacité des États à y répondre avec les méthodes classiques de réduction de la pauvreté et des inégalités sociales (du fait notamment de la « supranationalisation » des politiques économiques et des pressions des « marchés financiers ») d’autre part. Les États nationaux ont de moins en moins la main sur les questions économiques et sociales et cherchent à retrouver une légitimité avec les politiques de « tolérance zéro », de fermeté face aux désordres nés des frustrations sociales. Cette évolution économique globale est caractéristique du stade impérialiste du capitalisme que décrit Lénine : financiarisation du capital, militarisation de la production, accélération du libre-échange, formation de monopoles (multinationales) avec toutes leurs conséquences : multiplication des crises de surproduction, des guerres et des conflits sociaux. Le sécuritaire est un effet direct de ce processus de décomposition économique et sociale et durera tant que durera le capitalisme à son stade terminal. Seul un changement radical de société (une vraie révolution cette fois !) pourra être à même de le mettre au placard.

La Révolution sécuritaire (1976-2012) est encore disponible !